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Conférence : "L'Invitation au Voyage"
Chers amis de la poésie.
Voici les textes qui seront (ci-dessous et en fichier joint imprimable) lus lors de notre rencontre du mardi 5 novembre au Florida, je vous en souhaite bonne lecture.
Amicalement JGG
L’INVITATION AU VOYAGE textes
TEXTE N° 1 LES REGRETS du Bellay 1522/1560 sonnet
Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage, a
Ou comme celui-là qui conquit la toison, b 1er quatrain
Et puis est retourné, plein d'usage et raison, b
Vivre entre ses parents le reste de son âge ! a
Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village a
Fumer la cheminée, et en quelle saison b 2ème quatrain
Reverrai-je le clos de ma pauvre maison, b
Qui m'est une province, et beaucoup davantage ? a
Plus me plaît le séjour qu'ont bâti mes aïeux, c
Que des palais Romains le front audacieux, c 1er tercet
Plus que le marbre dur me plaît l'ardoise fine : d
Plus mon Loire gaulois, que le Tibre latin, e 2ème tercet
Plus mon petit Liré, que le mont Palatin, e
Et plus que l'air marin la douceur angevine. d
Composition du sonnet :
2 quatrains aux rimes embrassées….abba.
Suivis d’une trophe de 6 vers séparée en 2 tercets soit : 2 vers à rimes plates : « aïeux/audacieux » , suivis de quatre vers aux rimes embrassées deed
TEXTE N° 2 LES CONQUERANTS J.M. de Heredia 1842/1905
sonnet
Comme un vol de gerfauts hors du charnier natal,
Fatigués de porter leurs misères hautaines,
De Palos de Moguer, routiers et capitaines
Partaient, ivres d'un rêve héroïque et brutal.
Ils allaient conquérir le fabuleux métal
Que Cipango mûrit dans ses mines lointaines,
Et les vents alizés inclinaient leurs antennes
Aux bords mystérieux du monde occidental.
Chaque soir, espérant des lendemains épiques,
L'azur phosphorescent de la mer des Tropiques
Enchantait leur sommeil d'un mirage doré;
Ou, penchés à l'avant de blanches caravelles,
Ils regardaient monter en un ciel ignoré
Du fond de l'Océan des étoiles nouvelles.
TEXTE N° 3 LE RELAIS G. de Nerval 1808-1855
3 quatrains aux rimes plates (qui riment deux par deux)
alexandrins 12 pieds
En voyage, on s'arrête, on descend de voiture ;
Puis entre deux maisons on passe à l'aventure,
Des chevaux, de la route et des fouets étourdi,
L'oeil fatigué de voir et le corps engourdi.
Et voici tout à coup, silencieuse et verte,
Une vallée humide et de lilas couverte,
Un ruisseau qui murmure entre les peupliers, -
Et la route et le bruit sont bien vite oubliés !
On se couche dans l'herbe et l'on s'écoute vivre,
De l'odeur du foin vert à loisir on s'enivre,
Et sans penser à rien on regarde les cieux...
Hélas ! une voix crie : "En voiture, messieurs !"
Texte n° 4 BAUDELAIRE 1821-1867 L’APPEL DU LARGE
Un matin nous partons, le cerveau plein de flamme,
Le cœur gros de rancune et de désirs amers,
Et nous allons, suivant le rythme de la lame,
Berçant notre infini sur le fini des mers.
Mais les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent
Pour partir, cœurs légers, semblables aux ballons,
De leur fatalité jamais ils ne s’écartent,
Et sans savoir pourquoi, disent toujours : Allons !
Amer savoir, celui qu’on tire du voyage !
Le monde, monotone et petit, aujourd’hui,
Hier, demain, toujours, nous fait voir notre image :
Une oasis d’horreur dans un désert d’ennui !
TEXTE N° 5 L’INVITATION AU VOYAGE C. BAUDELAIRE
Mon enfant, ma soeur,
Songe à la douceur
D'aller là-bas vivre ensemble !
Aimer à loisir,
Aimer et mourir
Au pays qui te ressemble !
Les soleils mouillés
De ces ciels brouillés
Pour mon esprit ont les charmes
Si mystérieux
De tes traîtres yeux,
Brillant à travers leurs larmes.
Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté. « Distique strophe de 2 vers »
Des meubles luisants,
Polis par les ans,
Décoreraient notre chambre ;
Les plus rares fleurs
Mêlant leurs odeurs
Aux vagues senteurs de l'ambre,
Les riches plafonds,
Les miroirs profonds,
La splendeur orientale,
Tout y parlerait
À l'âme en secret
Sa douce langue natale.
Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.
Vois sur ces canaux
Dormir ces vaisseaux
Dont l'humeur est vagabonde ;
C'est pour assouvir
Ton moindre désir
Qu'ils viennent du bout du monde.
- Les soleils couchants
Revêtent les champs,
Les canaux, la ville entière,
D'hyacinthe et d'or ;
Le monde s'endort
Dans une chaude lumière.
Là, tout n'est qu'ordre et beauté,
Luxe, calme et volupté.
Texte N° 6 RIMBAUD Rêve pour l’hiver
L'hiver, nous irons dans un petit wagon rose
Avec des coussins bleus.
Nous serons bien. Un nid de baisers fous repose
Dans chaque coin moelleux.
Tu fermeras l'oeil, pour ne point voir, par la glace,
Grimacer les ombres des soirs,
Ces monstruosités hargneuses, populace
De démons noirs et de loups noirs.
Puis tu te sentiras la joue égratignée...
Un petit baiser, comme une folle araignée,
Te courra par le cou...
Et tu me diras: "Cherche!" en inclinant la tête,
Et nous prendrons du temps à trouver cette bête
Qui voyage beaucoup...
Texte n° 7 VOYAGE René Guy CADOU 1920-1951 extrait de : Bruits de cœur.
J’attends
La pendule et la roue tournent en même temps
Le train s’allume
Et le long des sapins
La grande peau qui fume
C’est la mer
Ne laisse pas ton cœur traîner par la portière
Prends ta place
Il fait bleu
Le ciel couvre la glace
Une étoile s’ébat
Quelqu’un qui s’est manqué se suicide tout bas
Mais je rêve
On a baissé le vent
Et le rideau se lève
Au milieu de la nuit
C’était toi.
Texte n° 8 Anna de Noailles Course dans l’azur
Extrait du recueil « Les éblouissements. »
quatrains octosyllabiques
Mon fils, tenez-vous à ma robe,
Soyez ardent et diligent ;
Déjà le matin luit, le globe
Est beau comme un lingot d'argent !
C'est de désir que ma main tremble,
Venez avec moi dans le vent :
Nous aurons quatre ailes ensemble,
Nous boirons le soleil levant.
Nous aurons l'air d'aller en guerre
Pour le bonheur, pour le plaisir,
Pour conquérir toute la terre
Et son ciel qu'on ne peut saisir.
Qu'importe votre frêle mine,
Et mes pas souvent hésitants,
Si les brises de Salamine
Gonflent nos vêtements flottants !
Je serai la Victoire blanche
Tendue au vent d-un coteau grec :
Le vent nous irrite et nous penche,
Mais on marche plus vite avec.
Retenez-vous à mon écharpe,
Vous êtes mon fils : il faut bien
Que vos cheveux, comme une harpe,
Jettent un chant éolien !
Vous avez dormi dans mon âme :
Il faut que votre être vermeil
S'élance, se meuve, se pâme ;
Combattez avec le soleil !
L'air frappera votre visage;
Avancez, joyeux, furieux,
L’important n'est pas d'être sage,
C'est d'aller au-devant des Dieux.
Comme on voit, sur un vase étrusque,
La danseuse et le faune enfant,
Nous poserons, d'un geste brusque,
Sur le monde un pied triomphant.
Je ne sais pas où je vous mène;
Je vous mène où sont les héros
C’est un vaste et chantant domaine,
Le plus terrible et le plus haut.
Que votre main sur votre bouche
Presse tout ce qui brûle et luit ;
L'univers me semblait farouche,
Je fus amoureuse de lui !
Que m’importe votre doux âge !
On est fort avant d'être grand ;
Je suis née avec mon courage,
Soyez un petit aigle errant.
Ah ! que pendant toute ma vie
Je puisse voir à mes côtés
Lutter votre âme ivre, ravie,
Vos bras, vos genoux exaltés !
Et, le jour où je serai morte,
Vous direz à ceux qui croiront
Que j'ai poussé la sombre porte
Qui mène à l'empire âpre et rond :
« Je l'ai laissée au bord du monde,
Où l'espace est si bleu, si pur.
Elle semblait vive et profonde
Et voulait caresser l'azur,
Je n'ai pas eu le temps de dire
« Que faites-vous ?... » Le front vermeil,
Je l'ai vue errer et sourire
Et s'enfoncer dans le soleil »
Texte n° 9 Alexandra David Nael
Les prodiges de l’Inde (extrait)
Texte n° 10 Pierre Daninos Les carnets du Major Thomson extrait Texte n° 11 Philippe Delerm
« La bicyclette et le vélo » extrait de « La Première gorgée de bière »
Texte n° 12 Jules SUPERVIELLE extrait de « Débarcadères » «
Marseille sortie de la mer, avec ses poissons de roche, ses coquillages et l'iode, |